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Journal de bord de Fabien Giraux
23 juin 2008

Stéphane André, « le secret des orateurs ; politique, média et entreprise »

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Résumé : Faire une présentation ou un discours est un calvaire pour la plupart d’entre nous. Le livre de Stéphane André nous propose une technique pour être présent dans son discours sans recourir à d’horribles fiches ou être prisonnier de son support powerpoint.
Verticalité, tenue des appuis, « contrat de la rampe », complémentarité du regard et de la voix, voilà qui balaie les faux trucs habituels en proposant une vraie alternative aux angoisses et aux tics de présentations.

Faire une présentation ou participer à une réunion de manière efficace en apportant de la valeur est toujours une ambition mais plus rarement une réussite.

Combien de présentations ou de formations sont sclérosées par l’omnipotent powerpoint ? Les grands rassemblement d’entreprises se transforment en litanies monocordes. Un texte figé y est égrainé mot à mot par un conférencier tétanisé. Ce n’est plus l’orateur qui représente sa cause mais un monologue continu qui emprisonne son présentateur.

Combien de réunions sont monopolisées par quelques rares individus ? Les autres se retiennent de présenter un point de vue différent, pris d’une peur quasi scolaire. Ils sont figés par une crainte d’être au centre des regards et ne participent pas. Le cœur n’y est pas. Les réunions s’enchaînent inlassablement. Il ne s’y passe rien. Et pour cause, il n’y a pas de débat contradictoire.

C’est un peu tout ça que cherche à combattre le livre de Stéphane André, « le secret des orateurs ; politique, média et entreprise ». Un combat qu’il relève avec panache dans un style très vivant et surtout agrémenté d’exemples du monde politique. Il suffit donc d’allumer son téléviseur pour étudier les orateurs qu’il cite, vérifier et rendre concrets ses constats.

Mais venons aux solutions que propose Stéphane André. En résumant abruptement son propos, l’orateur est un samouraï – Personnellement j’aime beaucoup la référence qu’il fait au film de Kurosawa les sept Samouraïs. Pour traduire cette comparaison revenons à quelques points essentiels des arts martiaux qui participent de la technique proposée par Stéphane André : « ici et maintenant », maîtriser ses appuis, éviter les fautes de corps, respirer et tenir son rôle dans ses valeurs, i.e. son message.

Venons en à l’essentiel :

  • Premier point, le « contrat de la rampe » : effectuer une présentation ou participer à une réunion implique comme au théâtre de jouer un rôle. Il ne s’agit pas de se laisser vivre au naturel. Il faut au contraire représenter le message à communiquer en dehors de soi et de ses propres affects ou sentiments. L’idée est de se dissocier de son message et de se concentrer sur le rôle à jouer.
    Au théâtre, l’acteur n’est pas Phèdre ou Hyppolite. Il y a une différence. C’est le cas aussi dans une réunion ou lors d’un discours. Si vous êtes chef de projet, manager ou responsable des comptes… vous jouez un rôle et c’est cela l’attente.
    Le samouraï est au service de sa cause. Ses sentiments ne peuvent que le faire échouer.

  • Point suivant, la verticalité : la gestion de l’énergie et de l’équilibre n’est pas anodine dans un combat. La verticalité du corps est essentielle pour maîtriser l’énergie rendue disponible par la respiration et soutenir l’effort nécessaire au combat.
    L’auteur Stéphane André, à ce sujet, parle de justice écologique. Il soutient que la verticalité améliore la tenue du corps, retient l’agressivité, permet une meilleure respiration. Il en déduit une relation entre la réussite des verticaux et l’échec des orateurs mollusques (les ratatinés dans leurs sièges) ou les penchés (vers l’avant). Il y voit là une sorte de sélection naturelle ou écologique.
    Comment obtenir cette verticalité ? Par l’utilisation combinée des appuis que sont les épaules, la tête tirée par un fil imaginaire attaché au niveau des oreilles. Il y a aussi les pieds ou les fesses selon que l’on est debout ou assis.
    La question des appuis est essentielle pour le samouraï. A l’arrêt ou en mouvement, les appuis vont assurer l’attaque efficace ou l’évitement salutaire.
    Je vous laisse essayer les exercices proposés, ils permettent une rapide prise de conscience des possibilités et des avantages de la verticalité sur ses appuis.

  • Mais les appuis ne sont rien sans « le regard ». C’est l’élément fédérateur des appuis. C’est lui qui permet la stabilité en donnant la direction, le feedback et le rythme.
    Je me suis longtemps demandé comment obtenir un feedback dans un discours dont je suis le seul acteur.
    Clarifions mon point de vue : lorsque je donne une formation, j’ai la chance de laisser intervenir les participants. Ils posent des questions, ajoutent des commentaires. J'obtiens là un vrai feedback. Je peux alors maximiser la valeur que j'apporte en adaptant mes exemples aux différents types de publics présents.
    Par contre, lors d’une conférence, il est assez rare de laisser la parole au public surtout lorsqu’il est nombreux. Une séance de questions-réponses est généralement aménagée à la fin. Mais cela n'est pas satisfaisant pour l'orateur. Tout le discours reste apparamment sans feedback, presque en roue libre.
    Ce que clarifie ici le livre de Stéphane André, c’est l’importance du « regard porté global ». C'est lui qui permet la prise de conscience de l’état du public. Voilà, j’ai enfin trouvé la porte vers ce retour immédiat du public que je recherchais depuis longtemps. Au moins il m’est devenu conscient.

  • La voix est le dernier point de la technique. Stéphane André évoque alors les techniques traditionnelles de la voix mises en œuvre au théâtre et dans le chant. Il cite notamment la technique du ‘vomissement’ ou du ‘bâillement’ mettant en avant qu’une voix se travaille. Elle repose assurément sur la respiration et avant tout sur une énergie permise par la verticalité et les appuis. On peut alors seulement en améliorer le timbre et la souplesse grâce aux techniques proposées.
    Mais l’important réside dans la complémentarité du regard et de la voix et je laisse la parole à Stéphane André :
    « Tout ce que fait la voix, le regard ne le fait pas. Et tout ce que fait le regard, la voix ne le fait pas.
    Elle fait résonner la solitude de l’orateur, il le rend solidaire de son auditoire
    Elle travaille en flux sortant discontinu, lui, en flux entrant continu.
    Elle vibre entre la terre et le ciel, il interroge les horizons.
    Elle saisit l’auditoire, il y prend soin de chacun.
    Elle diffuse le message, il recueille les avis.
    Elle maîtrise l’espace, lui, le temps.
    Elle fait le son, il filme l’image.
    A eux deux, ils font un. »

Alors je vous invite à lire son livre. Et si les premiers chapitres peuvent dérouter, en raison de la verve critique de son auteur, laissez-vous le temps d’entrer dans ce très grand texte qui sait fournir la valeur essentielle du pragmatisme et du contenu.

Et si je comprends mieux maintenant l’enjeu du Phèdre de Platon, je crois surtout que je vais m’appliquer à éviter les fautes de corps : portant ma verticalité sur mes appuis et dirigeant mon regard comme fenêtre vers mon public. Le travail ne fait pour moi que commencer.

Un grand merci à Stéphane André pour son livre. C’est un livre qui fait grandir.

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Commentaires
M
J'attends avec impatience d autres articles. Mais tu m'as aussi parlé d'un livre , traitant du même sujet par un auteur anglo-saxon.<br /> <br /> Marine
Journal de bord de Fabien Giraux
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